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La Vie des autres de Florian Henckel von Donnersmarck
Avec : Ulrich Mühe, Sebastien Koch, Martina Gedeck, Ulrich Tukur

Le Spectateur

Loin du charme désuet de Goodbye Lenin ! porté par cette fameuse Ostalgie, La Vie des Autres recadre l’histoire de l’ex RDA dans ce qu’elle avait de plus vicieux, le vaste système de surveillance de vingt millions de personnes. Au début des années 80, quand Gorbatchev ne dirigeait pas encore l’URSS, les hommes gris de la Stasi étendaient leur emprise sur une population réduite au silence.

Invité par son supérieur Grubitz, le capitaine Wiesler assiste à la première représentation de la nouvelle pièce du dramaturge Dreyman. Il ne connaît rien au théâtre mais se méfie de cet artiste communiste convaincu, trop irréprochable pour être honnête. A la demande du ministre, Wiesler espionne Dreyman et sa compagne, la comédienne Christa Maria Sieland. Il place leur appartement sur écoute et découvre bientôt dans l’intimité du couple les failles de ces artistes qu’il est censé surveiller…

Qu’est qu’un metteur en scène qui ne peut mettre en scène ? demande Jerska à Dreyman. Idéaliste, le dramaturge ne peut réconforter son vieil ami brisé par un régime qui lui interdit de travailler. Ce film remarquable de Florian Henckel von Donnersmarck joue sur plusieurs tableaux. D’un côté, l’officier zélé sans attaches sentimentales, de l’autre l’artiste tellement aveugle qu’il est persuadé que son appartement n’a pas pu être placé sur écoute.

Chacun à leur manière, ces personnages participent impuissants à la mise en place d’un système pernicieux. Le régime connaît le moindre détail de la vie des allemands de l’Est. Une phrase malheureuse d’un enfant peut condamner un père ou briser une carrière. Mais la pérennité du régime n’est pas vraiment menacée : les dirigeants du régime s’autorisent à peu près tout. Wiesler découvre ainsi rapidement pourquoi il a été chargé d’espionner Dreyman : sa compagne est la maîtresse d’un ministre.

Elle ne se fait guère d’illusions, consciente de sa condition misérable, sa carrière entre les mains de bureaucrates zélés. Dans une scène incroyable, Wiesler la réconforte dans un bar. Je suis votre public. Et pour cause. Le fonctionnaire a assisté à une représentation de sa pièce qui l’a ému tout comme il a enregistré son quotidien, la vie auprès de Dreyman mais également ses aventures avec son amant.

Où commence l’engagement ? Où finit le devoir ? Et l’obéissance ? Wiesler acquiert progressivement une humanité insoupçonnée, lui qui dans la scène d’ouverture explique à ses élèves comment mener l’interrogatoire d’un suspect. Il ne vit qu’au détriment des autres jusqu’à sa prise de conscience. En sauvant la vie de Dreyman, il se sauve lui même. Son nom s’inscrit désormais sur les premières pages d’un livre et pour la première fois de sa vie, il est enfin devenu quelqu’un.
J.H.D. 

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