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Serial noceurs de David Dobkin
Avec : Owen Wilson, Vince Vaughn, Christopher Walken, Rachel McAdams, Isla Fisher, Jane Seymour

L’incruste élevée au rang d’art

John et Jeremy sont de toutes les noces. Ils n’ont pas leur pareil pour y insuffler un vent de folie. Ils sont toujours les premiers à chanter les standards, danser avec les personnes âgées et les enfants, ou chahuter les mariés, quand leur face cachée, si mystérieuse et romantique, ne fait pas craquer les jeunes femmes célibataires. Pourtant, on ne les revoit jamais après et l’on peine à se souvenir de leur lien de parenté. Quoi de plus normal pour des squatters professionnels ? Car les deux compères sont d’authentiques pique-assiettes se fondant avec une aisance rare parmi les vrais invités pour profiter du bar, de la table et des filles. Leur palmarès est impressionnant et leurs méthodes infaillibles. Pourtant, rien ne se passe comme prévu au mariage de la fille de William Cleary, le Secrétaire au Trésor des Etats-Unis – soit l’Everest de l’incruste – et ils se retrouvent bientôt embarqués dans un week-end à la campagne chez une famille aussi respectable qu’imprévisible.

Depuis quelques années règne sur la comédie américaine grand public une sorte de mafia comique composée de Will Ferrell, Ben Stiller, Vince Vaughn et Owen Wilson. Ce quatuor du rire a su imposer sa marque de fabrique: des gags gentiment potaches saupoudrés de touches cradingues (fortement masochistes chez Ben Stiller), une tendance à la régression souvent réjouissante, le tout étant contrebalancé par des épilogues extrêmement sages au point de désamorcer les subversions dissimulées derrière les truculentes saynètes. Il en ressort ainsi une toute puissance du script, une succession de sketchs reliés par un fil narratif plus ou moins ténu; la réalisation étant confié à un simple exécutant. Cela donne des comédies tantôt sympathiques (Zoolander, Anchorman, Dodgeball), tantôt bancales (Mon beau-père et moi, Starsky & Hutch) mais jamais de franches réussites.

Serial Noceurs avait tout le potentiel pour devenir cette exception malheureusement les scénaristes Steve Faber et Bob Fisher (tous deux issus de la sitcom) n’ont pas assumé jusqu’au bout la satire mordante de cette famille bourgeoise puissante par son degré d’influence et ravagée par les névroses de chacun des membres qui la composent. Passé un prologue poussif, Serial Noceurs se révèle être une charge loufoque contre les us et coutumes de la grande bourgeoisie conservatrice de Nouvelle Angleterre. Cette partie, la meilleure et de loin, en dresse un inventaire vitriolé: l’ingénue nympho, le gendre faux philanthrope et pur produit de l’arrogance machiste enseignée dans les prestigieuses fraternités universitaires, la mère vicieuse autant accro au bistouri qu’aux p’tits jeunes vigoureux, le fils malingre et torturé adoptant une attitude d’artiste maudit, la grand-mère permanentée comme une ex-First Lady et haineuse comme un roquet…De cette galerie haute en couleurs émergent Christopher Walken en patriarche dépassé et Jane Seymour qui prend un malin plaisir à casser son image trop lisse. Dans cette partie de campagne chez les timbrés, Vince Vaughn emporte l’adhésion avec son rôle de parasite conscient du piège qui se referme mais contraint de subir des tortures physiques pour ne pas abandonner son ami (le bondage nocturne, les tirs de chevrotine dans les fesses, la masturbation au dîner…): avec son débit de mitraillettes digne de Martin Scorsese, il est irrésistible !

Hélas vient le moment où la supercherie est dévoilée au grand jour et, logiquement, le film prend l’eau à mi-parcours pour basculer dans la comédie romantique traditionnelle et assez ennuyeuse: le fameux désamorçage ! Et, comme à l’accoutumée, cette transition est incompatible avec le cynisme d’avant. Résultat: on attend que Serial Noceurs se termine en se disant que deux heures est une durée excessive pour une comédie de ce genre et surtout que les frères Farrelly restent les maîtres incontestés de la farce mal élevée et trash à tout prix.
J.F. 

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