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Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, Gallimard
 
Pages blanches

« Quand j’entend le mot culture, je sors mon revolver » disait Goebbels. La tête pensante du régime nazi avait tout compris. La culture et les livres posent problème car ils suscitent la réflexion, la subversion et le libre arbitre puis la liberté. Nul doute que quand Ray Bradbury écrit Fahrenheit 451 en 1953, les images des bûchers du troisième Reich résonnent encore dans son esprit.

Aujourd’hui, on ne brûle plus les livres. Le temps des autodafés semble révolu. Pourtant, certains pays condamnent toujours les écrivains et la littérature subit désormais des pressions marchandes. Une seule question se pose désormais : et si Ray Bradbury avait vu juste ?

Fahrenheit 451 se déroule dans une des ces utopies terrifiantes imaginée par la littérature de science-fiction. Les livres ont été bannis car les autorités estiment qu’ils constituent une menace contre l’ordre établi du 21ème siècle, le conformisme. Dans cette société, les pompiers n’éteignent plus aucun incendie puisque toutes les habitations sont ignifugées. Au contraire, ils forment un corps spécial, chargé de chercher et de brûler tous les livres et même les magazines.

Pompier émérite, Guy Montag se pose des questions. Il n’est plus heureux et ne croit plus à ce monde désincarné. Surtout, il a assisté au suicide d’une vieille femme morte en protégeant des livres. Une rencontre avec sa voisine Clarisse achèvent de remettre en question ses certitudes. Montag cache des livres mais devenu de fait un ennemi, il doit fuir…

La grande force du livre de Ray Bardbury tient à son imagerie radicale. L’auteur oppose deux conceptions. D’une part, il donne littéralement vie aux livres (« Montag sentit le livre qu’il cachait battre comme un cœur contre sa poitrine»), d’autre part, il explicite le discours fascisant qui assimile culture et littérature à des armes : « un livre est un fusil chargé dans la maison d’à côté. Brûlons le. Déchargeons l’arme. Battons en brèche l’esprit humain. Qui sait qui pourrait être la cible de l’homme cultivé »).

Ces quelques mots de Beatty le supérieur de Montag suffisent à comprendre le dessein totalitaire de la société imaginée par Ray Bradbury. Détruire le subjectif, le subversif, imposer la norme. L’écriture rageuse de l’auteur rend crédible cet univers où le mot « intellectuel est bien entendu devenu l’injure qu’il méritait d’être ».

Le roman de Ray Bradbury décrit ce qu’il advient de l’humanité une fois privée de son libre arbitre et de sa liberté d’expression, une page blanche. Fahrenheit 451 : température à laquelle le papier s’enflamme et se consume … avec la vérité. Une chef d’œuvre malheureusement toujours d’actualité

Editions Gallimard (Folio S.F.), 224 pages
J.H.D. 

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