Les cahiers de Monsieur F. : à propos de Drukqs

La singularité de Drukqs s’exprime surtout dans de courtes compositions au piano, dans un style plutôt dépouillé. Ces compositions au piano évoquent certes Satie (dont John Cage se réclame aussi - notamment à propos des Musiques d’ameublement ), quoique, beaucoup moins qu’on ne l’a prétendu et que Richard D. James lui-même l’a laissé entendre. C’est davantage le personnage que la musique qui importe ici. On y reconnaît pourtant, ça et là (titre 5 intitulé Stratta Tynhe), cette même simplicité expressive du langage modale et la distanciation rythmique, telles qu’on les retrouvent dans les Trois Gymnopédies, unissant adroitement basses et mélodie. Satie exerce aussi son influence à propos du silence et du dépouillement : juxtaposition  d’accords nus et réduits à leur simple expression, sur une base minimale, enchaînés de manière statique, c’est ainsi que se définit sa Messe des pauvres de 1895, notamment.

Stratta Tynhe semble également influencé par  Ravel (en particulier le deuxième mouvement de son Concerto pour piano en sol) et par certains préludes de Claude Debussy, avec une maîtrise bien moindre. Avril 14th  représente encore une autre option. L’influence de Satie est délicate à évoquée car elle est quasiment nulle, si ce n’est par extrapolation.

La richesse et la diversité de Druqks ne doit pas cacher une problématique sous-jacente. Au bout du cheminement, Aphex Twin pourrait bien se trouver dans une impasse, au moins apparente : poursuivre dans une voie qu’il maîtrise parfaitement au risque de se répéter ou aborder d’autres approches (piano préparé, compositions pianistiques dépouillées) pour lesquelles on a déjà fait beaucoup mieux.

Monsieur F.

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